Citytrip à Singapour

Encore une fois, Singapour n’était absolument pas prévu dans mon itinéraire de base. Je crois d’ailleurs qu’à ce stade de mon voyage, on ne peut plus parler d’itinéraire. Étant donné que j’ai cessé de prévoir quoi que ce soit et que je me laisse guider par mes envies, mon instinct et mes rencontres. C’est lors d’une soirée à Kuala Lumpur en Malaisie que des voyageurs.ses m’ont conseillée de m’arrêter quelques jours à Singapour, afin de m’imprégner de son ambiance si particulière. À ce moment de mon voyage, je venais de quitter Cameron Highlands, je m’y étais rendue après mes quelques jours à KL (Kuala Lumpur pour les intimes). J’attendais de belles randonnées et des paysages montagneux à couper le souffle mais, ce ne fût pas le cas. L’article sur ce blog résume parfaitement mon avis sur ce coin. J’y suis restée environ cinq jours et les seuls souvenirs agréables que j’aie sont les incroyables suissesse et la frenchie rencontrées mais également un retour de randonnée en stop à l’arrière d’un camion. Quelque peu déçue, je voulais quitter le pays car je sentais que je n’avais plus rien à y faire. Cela semble un peu brut mais, en voyage en sac à dos et sans billet retour, le plus important est de s’écouter soi-même et de marcher vers ce qui nous fait réellement envie. J’avoue m’être sentie quelques peu perdue après Cameron Highlands et je ne savais plus trop où poser mon minois. J’étais donc retournée à KL afin de revoir certains voyageurs.ses. Une soirée plus tard et rassurée, je partais pour Singapour.

Cinq heures de bus depuis Kuala Lumpur, une traversée de frontière par voie terrestre, une gourde oubliée à l’immigration et me voilà de nouveau en terre inconnue. Un bras levé et un taxi me récupère en l’espace de quelques secondes, afin de me déposer à mon auberge. Il est 1h du matin alors je file sous la couette après avoir profité d’une douche fraîche.

Lendemain matin, dès mes premiers pas dans la cité-état, je me sens dans un environnement sûr et le devoir d’être sur mes gardes me quitte. Bien que je n’aie jamais eu un sentiment d’insécurité dans les deux précédents pays. Mais il règne à Singapour un contrôle de tout, ici rien ne dépasse, rien ne sort du cadre. À savoir, le régime politique est reconnu pour son autoritarisme et son control freak. Tout est si calme, si serein, si apaisé. C’est un endroit d’une beauté assez particulière, j’oscille entre la verdure flamboyante et les buildings à en perdre le sens des grandeurs. Je foule les grandes avenues, je laisse défiler les personnes d’affaires, j’admire les fleurs nouvelles et les cascades sous des dômes. Pieds nus sur l’herbe, entourée d’immeubles ultra-modernes et d’une flore majestueuse, je réalise que je suis dans le nouveau monde. Mais quel est-il ?

Une architecture hors-normes


Tout n’est pas que grattes-ciel à Singapour, mais le cœur est bien là. Immeubles réfléchis autour de certifications environnementales, afin que ces derniers consomment le moins possibles. Caractère innovant, performance énergétique, économie de l’eau, intégration à l’environnement extérieur … l’architecture doit ici s’adapter à la nature tout en répondant aux besoins des humains. Des immeubles recouverts de végétaux, des systèmes de récupération d’eau à foison et bien sûr cette grandeur afin de loger et de faire travailler un maximum de personne sur un territoire restreint.

Je me balade sur la baie et je me laisse guider par mon regard, qui est rapidement accaparé par ces lumières et cette immensité. Il fait nuit, seule devant ce paysage, je me retrouve bousculée. Il y a une émotion que je n’aie jamais rencontrée durant mon voyage, cette sensation de solitude alors que bien entourée d’êtres humains qui grouillent, vivent, courent, aiment. Je ne me sens pas mal, bien au contraire. Je suis seule avec moi-même et je suis sereine. Souriante, je me dis que le monde est d’une immensité insoupçonnée et surtout que les possibilités sont beaucoup plus grandes qu’on ne le pense. Je me sens si petite et à la fois si grande, là, tout de suite, tout est possible. Le monde est à moi et je suis seule à décider de ce que j’en fais. Je me laisse pénétrer par ces émotions tout en admirant le panorama, le cœur pleins de volonté et les yeux emplie d’ambition.

Je ne sais pas pourquoi je ressens cette émotion à cet instant précis, devant des buildings qui plus est. Il y a comme une idée de force qui impose l’introspection, qui pousse à réfléchir à ce que je recherche et surtout souhaite me défaire. C’est comme un pont qui permet de prendre de la hauteur sur la multitude de controverses que je suis, c’est l’irrationalité de l’architecture, c’est la fureur d’aller toujours plus loin.

Une flore improbable


Je n’avais aucune idée à quel point la cité-état est habitée par une verdure aussi vaste, mais surtout à quel point le gouvernement se donne les moyens de végétaliser au maximum afin d’éviter une urbanisation à outrance et ainsi devenir une « cité-jardin ». Et pour cause, deux dômes géants, des jardins botaniques, des espaces verts à n’en plus finir, des espèces végétales par milliers.

Je me décide à aller visiter les deux célèbres dômes situés dans le « Gardens by the bay », sans grande attente à vrai dire. « Je vais aller dans un jardin quoi », quelle erreur ! Les serres sont majestueuses, tant par leur architecture novatrice que par les espaces naturels reproduits. Des dômes sans structures de maintien apparentes, la reproduction d’une forêt équatoriale, d’un environnement semi-aride méditerranéen. Les climats sont régulés par les « supertrees », arbres artificiels métalliques dotés d’un ingénieux système d’évaporation ou encore de panneaux photovoltaïques. Ce jardin futuriste est spectaculaire, riche et donne à rêver sur l’ingéniosité positive que l’être humain est capable de faire preuve.

Je me découvre ici et là un intérêt pour la photographie de fleurs, essayer de capter les infimes détails de celles-ci. Je me balade dans les dômes, les jardins, les parcs, les rues et tout est prétexte à découvrir de nouvelles espèces, même si c’est l’orchidée qui prédomine (emblème de Singapour), je trouve des fleurs toutes aussi singulières les unes que les autres. Je me balade davantage dans un jardin géant que dans un état.

Capitalisme 4ever


Désespérément à la recherche d’un bureau de change (je croulais encore sous les ringgit malaisiens et avait besoin de dollars singapouriens), j’entre dans un centre commercial. Je ne sais pas encore que je pénètre dans un espace haut de gamme où toutes les plus grandes marques de luxes côtoient des messages environnementaux. Je viens de sortir des Gardens by the bay avec en tête ces beaux discours sur la pénurie d’eau, de vivres, le réchauffement climatique, la désertification … Pour tomber sur quoi ? Le royaume de la consommation, qui plus est, l’industrie textile. Je suis perplexe à la vue d’un sac à 7866$ qui a nécessité des litres d’eau, des produits chimiques à sa fabrication alors que quelques minutes avant, on a tenté de me faire réaliser l’importance des ressources naturelles. Est-ce possible de baser son économie sur le capitalisme tout en désirant un monde vert ? Singapour le fait. D’ailleurs, les dirigeants.es ne s’en cachent pas et gèrent d’une main de fer tout le système économique de la petite cité-état.

S’il y a bien une chose qui caractérise Singapour, c’est son ambivalence. Les autorités se targuent d’être à la pointe des dernières technologies en matière d’écologie, d’être précurseuses concernant le lien entre l’humain et la nature, d’agir pour et vers un monde plus vert. Mais Singapour c’est aussi l’industrie pétrochimique, le 4e pôle financier mondial, le paradis de l’évasion fiscal, des investissements étrangers, d’une forte ouverture au commerce international. Ce que je trouve assez surprenant ce sont tous les discours, qui je pense sont une vraie volonté, autour de la cause environnementale mais qui dénotent avec le course à la consommation présente sur le territoire. Je ne sais pas toi, mais j’ai du mal avec l’idée d’un capitalisme écologique.

Ce serait donc ça le nouveau monde, lieu où les plus riches sont entourés de beaux jardins et où les plus pauvres se bousillent les mains à les construire. Singapour est grand et inspirant mais je ne pense pas que ce soit de ce monde dont je rêve.

Singapour est l’un de mes coups de cœur de mon roadtrip, agréablement surprise car je ne m’attendais à rien. Et surtout, je n’avais absolument pas prévu de le visiter. La joie et la curiosité de découvrir son ingéniosité, son amour des végétaux et sa folle architecture. Un spectacle grandeur nature sur tout son territoire et une ambiance à sentir et ressentir.

Singapour, du 3 au 5 janvier, 3 jours.

8 commentaires sur “Citytrip à Singapour

  1. Super intéressant et très belles images !
    C’est une destination que j’aimerai bien découvrir mais certains côtés me dérangent un peu notamment les inégalités très marquées dont tu parles à la fin de ton article…

    J’aime

    1. Cela reste à découvrir à 1000% ! C’est un lieu si particulier et vraiment il y a des choses à voir au moins une fois dans sa vie 🙂
      Après, très clairement, je n’y serais pas allée si je n’avais pas été à côté (en Malaisie). Mais je n’étais qu’à quelques heures de route donc autant en profiter. Concernant ces inégalités, la cité-état fait bien en sorte de les masquer … à vu d’oeil, je n’ai rien vu. Il faut avoir assez de curiosité et d’intérêt pour la voir. Parce que de manière général, tout est beau, propre, carré, rien ne dépasse. C’est assez fou …

      Aimé par 1 personne

Répondre à Mélodie Besnier Annuler la réponse.